LE JOUNALISTE ET LE COUREUR
Extrait
– Tu veux faire quoi ? S’exclame Henriette, mon épouse. Le Tour de France à vélo ? Non mais tu délires mon pauvre Léon ! Toi qui n’es déjà pas capable de faire le tour de la maison pour rentrer du bois !
– Ça n’a rien à voir, je te parle de vélo.
– Eh bien c’est bon à savoir, la prochaine fois tu n’auras qu’à aller chercher le bois à vélo ! Ironise-t-elle.
– Quel humour !
– Voyons Léon, redescends un peu de ton nuage, ajoute-t-elle, le tour de France ! Jamais ils ne termineront ! Et toi encore moins, il y a bien longtemps que tu ne fais plus de sport et tu souffles comme un bœuf dès qu’il s’agit de tailler le gazon !
– Ils annoncent tout de même 3.000 francs au gagnant de l’épreuve, c’est quasiment huit fois le salaire d’un ouvrier.
– Et par-dessus le marché tu te figures que tu vas gagner la course ? rétorque-t-elle.
– Le droit d’inscription n’est que de 20 francs.
– Parce qu’en plus il faut payer ?! S’exclame-t-elle. Et puis quoi encore ! Sans compter les frais annexes, hôtels, repas, et j’en passe !
– Ils donnent 2 francs par jour de défraiement.
– 2 francs ? Mais mon pauvre Léon, c’est ce que tu consommes par jour rien qu’en vin et en tabac !
4éme de couverture
Le 19 janvier 1903, pour faire de l’ombre à son concurrent Le Vélo, le journal quotidien sportif L’Auto annonce en une la création d’une épreuve exceptionnelle, « la plus grande course cycliste du monde entier », du 1er juin au 5 juillet. À la clé, une récompense de 3 000 francs pour le gagnant de l’épreuve – quasiment huit fois le salaire d’un ouvrier ! Pourtant, une semaine avant le départ, à peine quinze concurrents sont inscrits… C’est la panique en salle de rédaction. Pour ne pas paraître ridicule, le patron de L’Auto décide alors de décaler la course d’un mois et de gonfler la récompense : 5 000 francs. Le jour J, cinquante-neuf concurrents sont sur la ligne de départ : quarante-huit Français, quatre Suisses, quatre Belges, deux Allemands et un Italien. Mais rien ne se passe comme prévu…
Dans son nouveau roman, à cheval entre fiction et réalité, Benoît Leclercq raconte les coulisses de la naissance du Tour de France, son évolution – parcours, règlement, innovations… – chahutée par les grands événements historiques qui ont jalonné la première moitié du XXe siècle, mais aussi son ancrage progressif dans la culture française avec un engouement grandissant du public pour chaque nouvelle édition.